jeudi 3 avril 2014

Laurent Fabius dérobe le Commerce extérieur à Arnaud Montebourg


Le Commerce extérieur sera-t-il une prérogative de Laurent Fabius ?
Le portefeuille du Quai d'Orsay s'enrichit du Commerce extérieur, manière de récompenser "la diplomatie économique" chère au ministre des Affaires étrangères.

Le chef de la diplomatie française Laurent Fabius, 67 ans, reconduit dans ses fonctions dans le gouvernement Valls, voit élargir son portefeuille au Commerce extérieur, une première en France dans un contexte de crise économique toujours très vif. "Le Commerce extérieur est dans le champ des attributions de Laurent Fabius", a déclaré un responsable du Quai d'Orsay sous couvert d'anonymat. Peu avant, l'entourage d'Arnaud Montebourg avait assuré que ce domaine relèverait du portefeuille du nouveau ministre de l'Économie. L'ajout du Commerce extérieur au ministère des Affaires étrangères récompense "la diplomatie économique" chère à Laurent Fabius, présentée dès son arrivée au Quai d'Orsay en 2012 comme un des piliers de sa stratégie, et qu'il n'a eu de cesse de vanter au cours des deux années écoulées, notamment en Asie et en Amérique latine.
Ses actions pour promouvoir les entreprises françaises à l'étranger et chercher des marchés empiétaient de facto sur les platebandes du ministère de l'Économie, même si l'ancienne ministre déléguée au Commerce extérieur Nicole Bricq a toujours vanté la complémentarité entre les deux administrations. Certains ont critiqué cette priorité donnée à la "diplomatie économique". Dans une tribune publiée récemment dans Libération, les Arvernes, un groupe de hauts fonctionnaires, économistes et chercheurs anonymes, déploraient cette volonté d'être "présent sur tous les sujets". "Si promouvoir une diplomatie économique constitue en soi un objectif louable, ne correspond-il pas plutôt au rôle du ministère de l'Économie et des Finances ?" s'interrogeait cette tribune, estimant que l'"éparpillement" rendait la voix de la France "inaudible" sur les grands sujets.

Des résultats variables au Quai d'Orsay

Laurent Fabius, dont même ses détracteurs reconnaissent son implication et son côté bourreau de travail, n'a pourtant pas délaissé son domaine traditionnel depuis deux ans, avec des résultats variables. La France s'est voulue en pointe sur les grandes crises internationales telles la Syrie ou le nucléaire iranien. Mais si Paris a pu imposer sa voix dans les négociations avec l'Iran, la spectaculaire reculade américaine sur des frappes sur le régime de Damas a douché les ardeurs françaises. En Afrique, le "succès" de l'opération au Mali a davantage été imputé au ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, et Laurent Fabius a eu toutes les peines du monde à mobiliser ses pairs européens pour s'engager en Centrafrique.
Homme élégant, austère et maître dans l'art des perfidies ciselées, Laurent Fabius a cependant lissé son discours depuis sa nomination au Quai d'Orsay par François Hollande, son meilleur ennemi. Si les deux hommes se sont ouvertement détesté pendant des années, ils travaillent en bonne entente et sont sur la même longueur d'ondes, assure-t-on au Quai comme à l'Élysée.

Ministre le plus populaire

Ancien "plus jeune Premier ministre de la France" (de 1984 à 1986) du président socialiste François Mitterrand, Laurent Fabius, vétéran de la politique française, a été ministre du Budget en 1981, de l'Industrie et de la Recherche en 1983, de l'Économie et des Finances en 2000. Cette longévité et ses deux années passées à la tête de la diplomatie française, moins exposé au mécontentement des Français, lui ont permis de se façonner une image de professionnel aguerri au sein de l'ancien gouvernement Ayrault, marqué par les couacs de "jeunes" ministres inexpérimentés.
Résultat : il est actuellement le ministre le plus populaire parmi les Français. Né le 20 août 1946 à Paris, Laurent Fabius est normalien, agrégé de lettres et énarque. Issu d'une famille d'antiquaires, amateur d'art, il est l'auteur en 2011 d'un ouvrage Le Cabinet des douze, dans lequel il commente des "tableaux qui contribuent, à ses yeux, à "faire la France" (Renoir et les scènes de loisirs, Picasso et la guerre...)".

 

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