mardi 1 avril 2014

LA VISITE À ALGER DE JOHN KERRY S'ÉTALERA SUR DEUX JOURS : La nuit blanche du roi du Maroc

Le fac-similé de la lettre adressée par des sénateurs à James Baker
 
C'est une première dans les annales des relations algéro-américaines où un haut responsable US passe la nuit à Alger.
La diplomatie algérienne jubile et le roi du Maroc fait son cauchemar. Le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, arrivera demain dans son avion personnel à Alger. Il y passera la nuit puisque sa visite s'étalera sur deux jours avant de se rendre à Rabat. C'est une première dans les annales des relations algéro-américaines où un haut responsable US passe la nuit à Alger. Le geste est fort et atteste désormais que l'Algérie n'est plus ce pays craint et fuit pour son insécurité. De Colin Powell, à Condoleezza Rice et Hillary Clinton, ces secrétaires d'Etat américains faisaient à peine une escale à Alger, parfois de quelques heures, avant de se rendre à Tunis ou à Rabat pour passer la nuit. John Kerry vient de changer la donne. Réconfortée par la symbolique du geste, l'Algérie assume l'arrivée du secrétaire d'Etat américain, fut-elle durant la période de campagne électorale face à une opinion interne qui reste perplexe: cette visite est-elle un hasard du calendrier ou un positionnement affiché des Américains?
Qu'importe, «quand il y va de l'intérêt du pays, nous sommes pragmatiques, et puis nous on ne refuse pas une visite d'un partenaire aussi important que les Etats-Unis», répliquent des officiels algériens interrogés hier, par L'Expression. «Comme nous refusons que cette visite soit circonscrite au simple aspect sécuritaire. Il y a le dossier économique qui est autrement plus important, de même que l'aspect culturel» ajoutent les mêmes responsables, soulignant par ailleurs que «le dialogue avec les Américains est hissé au rang institutionnel». Le dialogue stratégique algéro-américain a été lancé en 2012 sur une volonté commune de trouver des opportunités pour, non seulement renforcer la coopération entre les deux pays, mais, aussi chercher de nouvelles pistes de collaboration dans les domaines politique, sécuritaire, économique, éducatif et culturel. Des sources ministérielles indiquent que le secrétaire d'Etat américain rencontrera de hauts responsables algériens et coprésidera avec M.Lamamra, la deuxième réunion du Dialogue stratégique USA-Algérie. Il rencontrera probablement aussi le président Bouteflika même si la rencontre n'a pas encore été confirmée par la présidence de la République. Du côté du Maroc, c'est l'affolement. Se prévalant de relations exceptionnelles avec les Etats-Unis, Mohammed VI, se fait doubler par son voisin de l'Est, l'Algérie, qui lui vole la vedette. Premier affront pour le roi, cette visite vient juste avant les débats sur le Sahara occidental au Conseil de sécurité de l'ONU devant évoquer la question de la reconduction du mandat de la Minurso. Ensuite, la visite intervient au lendemain de la réception grandiose à Wshington accordée par l'ONG «Robert F. Kennedy» à la militante sahraouie des droits de l'homme, Mme Aminatou Haïdar. Elle a appelé conjointement avec Mme Kerry Kennedy, à une plus grande mobilisation internationale pour le respect des droits de l'homme du peuple sahraoui violés par le Maroc ainsi que pour son droit à l'autodétermination. Mme Haïdar et Mme Kennedy ont lancé cet appel lors d'un débat-panel organisé conjointement par la Mission de l'Union africaine à Washington et RFKennedy Center en présence, notamment de représentants du corps diplomatique accrédité à Washington, de think tanks et de médias ainsi que du représentant du Front Polisario dans la capitale fédérale américaine, Mohamed Yeslem Beisat. La proximité avec les puissants lobbys américains dont jouit le Maroc vient donc d'être ébranlée. Et ce n'est pas fini quand on connaît l'engagement de John Kerry pour la cause sahraouie. M. Kerry appuie la solution onusienne préconisée pour le conflit sahraoui adoptée par les pays africains dont l'Algérie. Son engagement pour cette question ne date pas d'aujourd'hui. En 1990 déjà, il a adressé une lettre au secrétaire d'Etat américain, James A. Baker. «Nous nous adressons à vous pour exhorter un soutien plus conséquent des Etats-Unis aux négociations en cours sous l'égide des Nations unies entre le gouvernement du Maroc et le Front Polisario, concernant la souveraineté du Sahara ocidental», a écrit M.Kerry dans une lettre qu'il a cosignée avec d'éminents sénateurs américains dont Edward M.Kennedy, Alan Cranston, Bill Bradley et Paul Simon (voir fac-similé). «Le Maroc et le Polisario ont convenu de soumettre la question de la souveraineté du Sahara occidental à un référendum reconnu sur le plan international et qui sera supervisé par les Nations unies. Les négociations sont en cours pour parvenir à un accord qui régit le retrait pacifique des troupes marocaines du Sahara occidental», est-il écrit dans la lettre, ajoutant que «nous sommes néanmoins préoccupés, que sans un soutien américain direct, le dialogue entre les pays pourrait aboutir à une autre impasse».

LIBERTÉ

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire