jeudi 3 avril 2014

Huit dossiers chauds sur les bureaux de Sapin et Montebourg

 

Michel Sapin et Arnaud Montebourg - AFP

Tour d'horizon des dossiers que devront gérer rapidement le ministre des Finances et des Comptes publics et celui de l'Economie, du Redressement productif et du Numérique.

 

Négocier la trajectoire de déficit avec Bruxelles

A très court terme, Michel Sapin sera une pièce maîtresse de François Hollande pour aller négocier avec la Commission européenne la trajectoire de retour à l’équilibre des finances publiques. La France est désormais sous la surveillance renforcée de Bruxelles. Publié mi-avril, le programme de stabilité sera l’occasion pour le gouvernement de préciser ses intentions. Il « fera l’objet d’une attention particulière et pas aussi bienveillante que par le passé, estiment les économistes de BNP Paribas. Car, malgré les efforts déjà fournis, la situation budgétaire structurelle ne s’est que passablement améliorée, moins qu’en Espagne ou au Portugal par exemple ». Après les propos de François Hollande, lundi soir, qui ressemblaient fort à une demande de nouveau délai , les partenaires européens ont rappelé mardi la France à l’ordre.

Mettre en œuvre les 50 milliards d’euros d’économies

Michel Sapin va également devoir mettre en œuvre un plan de réduction sans précédent des dépenses publiques, face à une majorité parlementaire inquiète après la sanction des municipales et fragilisée après le départ des écologistes du gouvernement. Le plan de 50 milliards d’euros est quasiment prêt, les derniers arbitrages présidentiels sont en cours. Il sera détaillé dans le programme de stabilité. Un tel effort ne peut se faire sans accentuer la pression sur la fonction publique, les collectivités locales, ni sans tailler dans les dépenses sociales.

Baisser les charges sur les entreprises

Le pacte de responsabilité , qui réduira les charges des entreprises de 10 milliards d’euros, « est prêt », a annoncé François Hollande lundi, et sera dévoilé dans quelques jours. La forme exacte que prendra cet allégement du coût du travail n’est pas encore connue. Réduction des cotisations sociales ? Extension du crédit d’impôt compétitivité ? Un peu des deux ? Quelle part de la mesure interviendrait-elle dès 2015 ? Une chose semble certaine, les bas salaires devraient bénéficier plus que les autres de cet allégement des charges patronales afin de maximiser l'effet sur l’emploi.

Diminuer la fiscalité des entreprises

Autre composante du pacte de responsabilité, la diminution des impôts des entreprises est un autre dossier chaud. Un groupe de travail composé de membres du patronat, d’élus et d’experts vient de remettre ses propositions. Il a plaidé pour la suppression dès 2015 de la C3S, un impôt sur le chiffre d’affaires des entreprises qui rapporte un peu plus de 5 milliards par an, ainsi que pour une diminution du taux de l’impôt sur les sociétés, très élevé en France. L’un des derniers scénarios évoqués tenait compte de ces deux demandes. Le montant de l’enveloppe qui sera allouée aux baisses d’impôt pour les entreprises n’est pas complètement arbitré, mais un montant compris entre 5 et 8 milliards d’euros a été évoqué. L’ampleur du geste dépendra des économies réalisées sur les dépenses publiques et de la marge de manœuvre que laissera Bruxelles.

Faire un geste pour les ménages

Lancée par Jean-Marc Ayrault fin 2013, un temps enterrée, la grande « remise à plat » de la fiscalité des ménages est revenue sur la table après la déroute de la gauche aux municipales. Accusé de privilégier les entreprises au détriment des ménages, François Hollande a annoncé lundi un geste en direction de ces derniers, avec la promesse d’une baisse des cotisations sociales payées par les salariés. Un groupe de travail emmené par le député Dominique Lefebvre (PS) a finalisé un premier rapport ce mercredi et remettra ses propositions le 10 avril. Il propose en particulier de baisser les cotisations des salariés les plus modestes dès l’an prochain tout en supprimant la prime pour l’emploi, un crédit d’impôt dont le fonctionnement est critiqué. Un scénario sur lequel travaillait aussi l’Elysée ces derniers jours. Une enveloppe de 2 à 3 milliards d’euros devrait être dégagée, mais le quantum précis n’est pas encore arbitré.

Négocier la loi bancaire européenne

Le sujet ne devrait être abordé qu’à la fin de l’année mais il est sensible pour les banques françaises. Le Parlement et le Conseil européen vont en effet devoir se prononcer sur le projet de loi de séparation bancaire présenté par le commissaire Michel Barnier en janvier. Ce texte propose de fixer pour les 30 premières banques européennes des seuils de risque au-delà desquels certaines activités, en particulier la tenue de marché, seront filialisées. Cela en renchérirait donc le coût car il faudrait que les filiales disposent de leurs propres fonds propres. Les banques françaises estiment que cela mettrait à mal leur modèle de banque universelle et, par ricochet, le financement de l’économie. Un risque que Bercy ne voudra sans doute pas prendre.

Limiter la casse dans les télécoms

Avec le rachat de SFR, qui pourrait se décider dès jeudi, c’est tout le secteur des télécoms qui se reconfigure. Si Numericable l’emporte, ce qui semble le plus probable à ce stade, Bouygues Telecom pourrait se faire racheter par Iliad, la maison mère de Free. Si Bouygues prend SFR, il y aura de profondes restructurations car les deux entreprises sont très semblables. A plus ou moins long terme, le marché risque donc de basculer d’un modèle à quatre opérateurs mobiles vers trois – comme l’a publiquement souhaité Arnaud Montebourg. Le ministre avait ouvertement soutenu le projet de Bouygues mais il s’est fait plus discret depuis deux semaines, en raison des risques de casse sociale que comporte cette opération. Quel que soit le repreneur, il devra veiller à ce qu’il respecte ses engagements en termes d’investissement dans le très haut débit et de sauvegarde des emplois.

FagorBrandt : 1.800 emplois menacés

Quelque 1.800 emplois sont en jeu chez FagorBrandt, répartis sur 4 sites de production en France. Placé en redressement judiciaire, le fabricant d’électroménager, connu pour ses marques Vedette, Sauter ou De Dietrich attend de connaître son sort. Le principal candidat à sa reprise, le groupe algérien Cevital veut récupérer la propriété des marques avant de confirmer son offre qui porte sur 1.200 postes. Problème, ces marques sont détenues par une filiale irlandaise du géant espagnol Fagor, la maison mère de FagorBrandt, qui est elle-même en dépôt de bilan. Cevital doit donc obtenir l’aval de la justice espagnole pour les récupérer. Mi-mars, les juges de San Sebastian ont rejeté la proposition de rachat des marques par le conglomérat algérien, le montant étant jugé insuffisant. Ce qui a pour conséquence de bloquer le dossier en France. La trésorerie de l’entreprise s’amenuise de jour en jour. Le dossier est explosif pour Arnaud Montebourg. Le tribunal de commerce de Nanterre a fixé son audience, déjà repoussée quatre fois, au 11 avril. Sans doute le rendez-vous de la dernière chance.

Les Échos.fr

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire