mardi 25 février 2014

Nassim Kerdjoudj. PDG de Net-Skills : «Nous avons plus besoin d’investissement en matière grise que de numéraire»

Nassim Kerdjoudj fait partie de ceux qui sont revenus au pays après des études à en France et une riche carrière professionnelle pour contribuer au développement économique du pays. Il a lancé en 2004 Net-skills, une société de services en ingénierie informatique. Une entreprise qui a parcouru jusque-là un bon chemin avec une activité en nette croissance et de grands projets en perspective.
-Vous avez commencé votre carrière professionnelle en France. Vous avez décidé par la suite de lancer votre projet en Algérie. Qu’est-ce qui a motivé ce retour au pays ?
Lorsque je suis parti faire mes études supérieures en France après mon bac, au début des années 90, je m’étais déjà fixé comme objectif de vivre une expérience à l’étranger pendant une dizaine d’années puis rentrer. Je suis rentré au bout 12 ans…
Ce qui a donc motivé mon retour, c’est simplement qu’il a été programmé dans ma tête dès le jour de mon départ, après c’était une question de timing et de circonstances.Le début des années 2000 correspondait à une nouvelle dynamique dans le pays avec beaucoup d’enthousiasme et de volonté de sortir des années noires, une forme de renaissance peut-être. Cela a fait écho chez moi à une volonté de participer à la reconstruction de ce pays qui a souffert un peu comme mes parents après l’indépendance… Mes parents se sont beaucoup investis dans la construction de l’Algérie post-indépendance ; lorsqu’on grandit dans un tel milieu, il est difficile de se soustraire à l’influence de cette dimension des choses.Mais ce qui différencie peut-être notre génération de celle de nos parents, c’est que la conception de la réussite ne se limite pas à la satisfaction intellectuelle du travail accompli, la réussite matérielle doit aussi être au rendez-vous. J’ai toujours rêvé d’avoir mon entreprise, et j’ai senti que c’était le bon moment de le faire et que toutes ces conditions étaient réunies.

-Qu’en est-il justement des étapes qui ont précédé le lancement de Net-Skills ?
D’abord le sentiment d’avoir acquis une solide expérience professionnelle dans les plus grandes entreprises mondiales de mon secteur et d’y avoir réussi de belles réalisations. Ensuite vient l’envie de relever un nouveau défi, c’est à ce moment-là qu’on commence à visualiser sa propre entreprise. J’ai donc commencé à élaborer un business-plan, définir mes offres, le positionnement sur le marché, puis je me suis lancé dans le processus de création habituel. Je suis passé par le dispositif Ansej, et je suis très fier d’être un produit de l’Ansej qui est une structure qui a permis de produire de belles entreprises.
J’ai d’ailleurs une pensée pour son directeur de l’époque qui est devenu depuis un ami proche et qui prenait sa mission très à cœur.
Comme tout le monde, j’ai eu à affronter les obstacles habituels, mais rien de bien original...
-Comment situez-vous actuellement  votre entreprise sur la scène économique nationale ?
Net-Skills reste une entreprise de taille modeste, car notre secteur ne favorise pas, de par la taille de la demande et le nombre important de petites entreprises, un développement linéaire et important de nos structures, mais je suis fier de constater que nous comptons à notre actif de très belles réalisations technologiques dans le domaines de l’IT et de la messagerie mobile d’entreprise avec la solution Black Berry que nous avons été les premiers en Afrique du Nord à mettre en service chez Mobilis en 2006 ! Net-Skills poursuit son développement aujourd’hui en s’orientant davantage vers les Telecom et en s’alliant avec des acteurs mondiaux du secteur.

-Le contexte est-il favorable aujourd’hui pour le retour de la diaspora sachant que de nombreuses initiatives sont lancées dans ce cadre ?
C’est une question difficile, car il n’y a pas qu’une seule diaspora, il y en a plusieurs avec des attentes différentes. Il y a, entre autres, ceux qui veulent rentrer complètement et définitivement, ceux qui veulent rester à cheval entre les deux pays, et ceux qui veulent avoir de nouvelles perspectives de carrière en Algérie que leur offre la mobilité professionnelle des multinationales, mais sans certitude d’y rester. Puis, il y a aussi l’ambiguïté du concept de diaspora : est-ce qu’il englobe seulement les Algériens partis à un moment de leur vie et qui sont susceptibles de rentrer, ou également les citoyens d’un autre pays nés là-bas mais de parents algériens et dont le lien se «limite» à leurs origines familiales, mais dont le sentiment d’appartenance à l’Algérie est suffisamment fort pour leur donner envie d’y venir.  L’histoire montre que tout pays ne peut se passer de sa diaspora pour se développer (la Chine, l’Inde, le Moyen-Orient…) mais que les conditions de leur intégration et de leur influence positive dépendent fortement des conditions mises en place. Je crois qu’il reste encore du travail à accomplir pour réunir ces conditions chez nous.
-Un conseil à donner à ceux qui veulent rentrer investir en Algérie ?
Tout dépend de ce que vous appelez investir. Est-ce l’argent ou du temps et de la matière grise ? A mon sens, nous avons plus besoin d’investissement en matière grise que de numéraire, je ne permettrai pas de donner de conseils aux investisseurs quels qu’ils soient, peut-être quelques recommandations : bien identifier les valeurs et les motivations qui nous poussent à venir en Algérie et s’y tenir et être capable de prendre du recul face à l’adversité. Net-Skills a cependant profité de l’essor du secteur en devenant, notamment, le distributeur officiel de Black Berry en Algérie et en multipliant les partenariats avec les plus grands noms de l’informatique tels que Cisco, IBM et Hewlett-Packard. Dès 2007, nous avons tenté le pari de la croissance par la taille. Nos bénéfices ont toujours été réinvestis depuis le début afin d’avoir une dimension conforme à nos ambitions. Le secteur privé est comme un enfant illégitime difficilement reconnu par l’Etat algérien.

EL WATAN

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