samedi 5 octobre 2013

Marche pour l'égalité et contre le racisme, surnommée Marche des beurs

La Marche pour l'égalité et contre le racisme[1], surnommée par les média Marche des beurs, est une marche antiraciste qui s'est déroulée en France en 1983. Il s'agit de la première manifestation nationale du genre en France.

Genèse

Durant l'été 1983, de rudes affrontements opposent policiers et jeunes dans le quartier des Minguettes à Vénissieux, une ZUP dans la banlieue lyonnaise. Pendant les affrontements, Toumi Djaïda, le jeune président de l'association SOS Avenir Minguettes, est blessé par un policier et transporté d'urgence à l'hôpital. Rodéos, incendies de voitures, dégradations urbaines, courses poursuite avec la police, sont à nouveau filmés, largement repris dans la presse[2],[3],[4],[5].
Des habitants du quartier, dont le curé Christian Delorme et le pasteur Jean Costil, ont alors l'idée d'une longue marche, inspirée par Martin Luther King et Gandhi. Deux revendications principales : une carte de séjour de dix ans et le droit de vote pour les étrangers[6]. Toutefois, selon un chercheur, « Mogniss Abdallah à Nanterre ou Djida Tazdaït et les militants lyonnais de Zaâma d'banlieue n'étaient guère favorables à une initiative dominée par les animateurs de la Cimade (le père Christian Delorme et le pasteur Costil) qui n'étaient pas « issus de l'immigration ». »[7],[8]

Contexte politique

Le contexte politique est celui des élections municipales partielles à Dreux, où le Front national, jusque-là électoralement marginal, vient de remporter son premier succès avec 16,72 % au premier tour, un an et demi après des cantonales où son candidat Jean-Pierre Stirbois avait déjà fait une percée à 10 % dans le canton de Dreux-Ouest. La liste FN fusionne avec la liste RPR au second tour le 11 septembre 1983, remportant l'élection au détriment de la gauche. Cet événement est très médiatisé à l'époque. À droite, seuls Bernard Stasi et Simone Veil condamnent cette alliance. Le 18 septembre, Jacques Chirac déclare « Je n'aurais pas du tout été gêné de voter au second tour pour la liste [RPR-FN]. Cela n'a aucune espèce d'importance d'avoir quatre pèlerins du FN à Dreux, comparé aux quatre ministres communistes au Conseil des ministres. ». L'année suivante, le FN remporte dix sièges aux élections européennes[9],[10],[11],[12].
Quelques mois plus tôt, en janvier 1983, le Premier ministre socialiste Pierre Mauroy, le ministre socialiste de l'Intérieur Gaston Defferre et le ministre socialiste du Travail Jean Auroux avaient stigmatisé les grévistes CGT de Renault-Billancourt, en majorité des « travailleurs immigrés », en les accusant d'être manipulés par des « intégristes ». Mauroy déclare notamment au Monde du 11 février que les grévistes de Renault « sont agités par des groupes religieux et politiques qui se déterminent en fonction de critères ayant peu à voir avec les réalités sociales françaises ». Le sociologue Abdelmalek Sayad écrira plus tard à ce sujet que « On ne mesure pas assez combien les ouvriers immigrés souffrent du climat de suspicion qui a gagné le travail et dont ils font une douloureuse expérience : des ouvriers pourtant analphabètes ont gardé des coupures de journaux rapportant les commentaires d'hommes politiques dénonçant les grèves des immigrés, laissant entendre qu'ils seraient de connivence avec quelque force étrangère. »[13],[14] .

Première marche

La marche part de Marseille avec 32 personnes le 15 octobre 1983. Une seule personne les accueille à Salon-de-Provence. Elles seront plus de mille à Lyon. La marche est marquée par la nouvelle de l'assassinat d'Habib Grimzi, jeté du train Bordeaux-Vintimille par trois candidats-légionnaires[6].
Le mouvement prend de l'ampleur. Les partis politiques de gauche et les associations appellent leurs militants. À Paris le 3 décembre, la marche s'achève par un défilé réunissant plus de 60 000 personnes, Libération titre en une « Paris sur "beur" »[15],[16]. Une délégation rencontre le président de la République François Mitterrand qui accorde alors la possibilité d'une carte de séjour et de travail valable pour dix ans[6].

Wikipédia

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